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Débits de boissons à Ouagadougou : états des lieux et perspectives

Au commencement de toute société, il y a toujours des lois qui régissent son fonctionnement. Qu’elles soient dures ou pas, ces lois dont l’application ne devrait souffrir d’aucune ambigüité devraient permettre un meilleur développement dans un vivre ensemble sans équivoque. Malheureusement le non respect de celles-ci engendre sans doute des dysfonctionnements et des frustrations. C’est le cas par exemple de la loi n°9/79/AN du 7 juin 1979 régissant les débits de boisson au Burkina Faso.

Que dit cette loi ?

L’article 9 de cette loi stipule clairement que : « Aucun débit de boissons ne peut être ouvert sans l’autorisation préalable du préfet ou du maire, délivrée après avis du comité local de salubrité publique et du service des impôts ».

Avant l'ouverture du débit, le prestataire devrait clairement choisir la catégorie de vente. En effet il y en a trois: la première catégorie concerne la vente de sucrerie et de la bière, la deuxième catégorie porte sur la vente de sucrerie, de la bière et des vins. Quant à la troisième, elle porte sur la vente de sucrerie, de la bière, des vins et des liqueurs. L’autorisation est délivrée au commerçant en fonction de la catégorie de boissons qu’il désire vendre.

A l’article 10 de cette loi on peut lire : I est fixé un ratio d’un débit de boisson pour 2000 habitants dans les agglomérations de plus de 10.000 habitants. Dans les villes moyennes où le nombre d’habitants est compris entre 1000 à 10000, ce ratio est de un débit de boisson pour 1000 habitants, puis un seul pour les villes de moins de 1000 habitants.

Selon cette loi, il ne devrait pas y avoir un maquis à moins de 400 mètres des écoles, centres de santé (hôpitaux, dispensaires, maternités), édifices culturels, cimetières, centres sociaux et organismes publics créés en vue du développement physique et moral de la jeunesse. Mais le constat est tout autre. A Ouagadougou nous avons des débits de boissons adossés aux murs d'établissement d'enseignement, aux hôpitaux, aux stades du 4 août et municipal, etc

Quel constat à Ouagadougou ?

Tout est dit, tout est clair mais à Ouagadougou la recherche du profit a englouti la réglementation en vigueur donnant du coup du fil à retordre aux maires et à la police municipale. Selon une enquête de la police municipale effectuée en juin-juillet 2014, il est ressorti que la ville de Ouagadougou compte : 279 bars, 1.383 buvettes, 1.705 kiosques, 93 jardins, 25 boîtes de nuit, 99 caves, 286 cabarets, soit un total de 3870 débits de boissons pour une population estimée à l’époque à 1.915.102 habitants. On a donc 1 débit de boissons pour 494 habitants.

L’analyse de cette situation montre par exemple pour ce qui concerne les bars les manquements suivants :

Pour 279 bars 228 occupent partiellement le domaine public sans autorisation, 218 bars occupent la voie publique sans autorisation, 183 bars occupent des parcelles à usage d’habitation, 174 bars n’ont pas de certificats de désinfection, 161 bars n’ont pas d’autorisation d’ouverture, 125 bars n’ont pas de certificat de salubrité, 79 bars n’ont pas de licence équivalente à la catégorie de boisson vendue,154 gérants n’ont pas de carte professionnelle de santé.

Pour 1383 buvettes recensées on a : 1.133 buvettes fonctionnent sans autorisation d’ouverture, 1.081 buvettes n’ont pas de certificat de salubrité, 1.206 buvettes sont sans certificat de désinfection, 1.099 buvettes n’ont pas de carte professionnelle de santé, 559 n’ont pas une licence conforme à la catégorie de boissons vendues, 1241 buvettes occupent partiellement la voie publique sans autorisation. 656 buvettes sont implantées dans des parcelles à usage d’habitation et 1.205 buvettes occupent partiellement une portion du domaine public.

Au regard de ces observations, c’est donc dire que la réglementation en vigueur est foulée au pied par les différents prestataires. Comment peut-on ouvrir un débit de boissons sans aucune autorisation du maire d’arrondissement ? Pourtant les textes sont assez clairs. Pour toute ouverture de ce genre de commerce, le prestataire doit au préalable déposer une demande d’ouverture à la mairie afin de bénéficier d’une licence d’exploitation si toutefois il remplit les conditions. Une fois cette licence obtenue, il est tenu au respect du cahier de charges : certificat de salubrité et de désinfection, licence conforme à la catégorie de boissons vendues, impôts, respect de son entourage afin d’éviter les nuisances sonores nocturnes, etc.

Quelles conséquences ?

L’installation anarchique et le nombre très élevé des débits de boissons ne sont pas sans conséquences. On peut citer entre autre :

-les plaintes régulières des riverains qui subissent ‘le diktat’ de ces débits à travers les nuisances sonores nocturnes pourtant, jouer de la musique dans ces débits après 23h est illégal.

-les incompréhensions entre les services municipaux et les tenanciers d’une part et entre la police municipale et ces derniers d’autre part.

-La dépravation des mœurs dans certains débits de boisson (prostitution, drogue, banditisme)

-La fréquence des accidents due à l’occupation de la voie publique par certains débits de boissons, cela obstrue la voie.

-L’alcoolisme devenu un problème de santé publique

Quelles suggestions ?

Nous sommes conscients de la complexité du problème mais ce n’est pas pour autant que nous devons laisser faire. Il faut agir avec tact afin que tout le monde puisse trouver son compte. En effet ¾ des débits de boissons à Ouagadougou ne devraient pas exister. Maintenant que nous sommes devant le fait accompli quelle sera la conduite à dire ? Rappelons que la majorité des gérants exerce dans l’illégalité. Beaucoup ne possèdent pas d’autorisation d’ouverture. Face à ce désordre, les pistes de réflexion et de solutionnèrent sont à envisager :

-Une relecture de la réglementation avec tous les acteurs puis veiller à son application

- L’arrêt de nouvelles ouvertures de débits de boissons pour un temps donné comme ce qu’on constate avec les lotissements

- la diminution drastique de ceux déjà existants et qui ne respectent presque pas la loi en matière de commerce de boissons

-L’adoption d’une résolution particulière sur le cas des boisons frelatées

-L’appui de l’Etat central aux collectivités territoriales pour plus d’action de grande envergure

-La régularité des séances de sensibilisation pour informer, recadrer certaines activités et (ré)définir les lieux d’implantation des débits de boissons

-La multiplication des contrôles par la mairie, les services sanitaires et la police municipale

-La création d’un fichier informatisé des débits de boissons pour plus de lisibilité

-L’interdiction d’utiliser les parcelles à usage d’habitation pour des fins commerciales

-L"interdiction d'installation anarchique sur le domaine public et sur les voies

‘etc.

Que conclure ?

Comme toute activité commerciale régie par des lois, la commercialisation des différentes boissons dans la ville de Ouagadougou doit être minutieusement encadrée. Au delà du fait que cette activité permet de nourrir des familles, l’on devrait arriver à la canaliser afin qu’elle ne soit pas un danger pour la société en général et pour la jeunesse en particulier. Face au désordre mentionné ci-dessus, les mairies ont fort à faire et c'est peu de le dire. Elles ont besoin de beaucoup de courage et du soutien de tous pour assainir ce milieu. Il est donc temps que les tenanciers des débits de boissons et les autorités s’accordent sur un plan d’action, toute chose qui privilégiera l’intérêt commun et la bonne marche de la société.

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